A lire sur: http://www.pcinpact.com/news/79666-la-neutralite-net-rabotee-sous-carotte-l-exception-culturelle.htm
CNN<->loi de 86<->CSA<->Arcep
Le CNNum invite le gouvernement à légiférer sur la neutralité des réseaux
publié le 12/03/2013 à 15:53 - 10 commentaires
Une mesure
discrète du rapport Lescure risque de faire grand bruit. Elle concerne
les fournisseurs de service, comme les plateformes vidéo, qui
accepteraient de prendre des engagements volontaires pour l’exception
culturelle. Un acteur - même étranger, qu’il soit éditeur, distributeur
ou hébergeur, accéderait à de juteux avantages… et parfois même en
termes de priorité dans la gestion des débits.
Tu
me fais un gros effort sur l’exception culturelle, je t’offre des
tombereaux d’avantages ! C’est en résumé ce que voudrait Pierre
Lescure : un système de donnant-donnant pour inciter les acteurs à des
comportements jugés vertueux. Lever la main droite et cracher par terre
ne suffiront pas.
L'intervention du CSA, omniprésent
Ces
engagements et leurs contreparties seraient mis noir sur blanc dans une
convention établie sous l’égide du Conseil supérieur de
l’audiovisuel. « La logique du conventionnement est inhérente au
fonctionnement du CSA, qui a pris l’habitude, dans ses relations avec
les services linéaires, de moduler les droits et obligations des
chaînes, notamment en fonction de leur chiffre d’affaires, de leur
audience et de leur format ».
Le CSA chapeauterait ainsi cet accord donnant-donnant, tout en héritant des compétences de la Hadopi sur « la mission d'observation des pratiques culturelles en ligne »
et la réponse graduée. Il y aurait en somme une forme de menu, avec une
colonne engagements et une colonne avantages possibles.
Des engagements pour l'exception culturelle
Quelques
exemples d’engagement ? Les services de musique en ligne qui mettraient
en œuvre des quotas d’exposition de la création européenne ou française
sur leur page d’accueil. Ou encore Dailymotion qui souscrirait un
engagement d'exposition d’œuvres avec des quotas de productions
indépendantes ou de « nouveaux talents ». Les efforts pourraient être
plus matériels : des contributions au financement de la création en
pourcentage du chiffre d’affaires, des dépenses affectées à la
numérisation pérenne des œuvres… Et même des tarifs sociaux (chômeurs,
étudiants…) ou la gratuité d’accès (un film gratuit par mois sur un
service de VàD...), ou des partenariats avec les bibliothèques, les
médiathèques, les écoles et les universités.
De juteuses contreparties... notamment en terme de priorité dans la gestion des débits
Qu’auraient
à gagner les acteurs, les plateformes, etc. qui s’engageraient ainsi
sur le terrain de l’exception culturelle ? Plein d’avantages ! Par
exemple une priorité dans l’accès aux soutiens publics, voire un
relèvement des taux et des plafonds d’aide. Ils pourraient aussi plus
facilement accéder aux œuvres par un aménagement de la chronologie des
médias pour les services de vidéo à la demande les plus vertueux (une
VàD à 3 mois au lieu de 4, une VàD à la demande de 22 mois au lieu de 36
mois, etc.).
Mais une dernière mesure va faire du bruit : pour les plus « vertueux » des acteurs, la crème de la crème, « une
priorité dans la gestion des débits pourrait même être envisagée, sous
le contrôle de l’ARCEP et dans le respect des règles qui seront adoptées
concernant la neutralité du net ». Page 161, on apprend que les
services les plus généreux avec l’exception culturelle profiteraient
ainsi d’une priorisation des débits volontaristes, profitant du coup
d’une neutralité moins neutre que les autres acteurs !
Le CNNum, la neutralité et le CSA
Pour le coup, le puzzle se rassemble. Rappelons que le CNNum préconise justement de rattacher le principe de la neutralité dans la loi de 1986
sur la liberté de communication, celle-là même qui est orchestrée par
le CSA. Dans la proposition du CNNum, un alinéa à l’article premier
affirmerait que « la neutralité des réseaux de communication, des
infrastructures et des services d’accès et de communication ouverts au
public par voie électronique garantit l’accès à l’information et aux
moyens d’expression à des conditions non-discriminatoires, équitables et
transparentes. » Il n’y aurait ainsi pas de discrimination
illégale puisque les acteurs priorisés feront dans le même temps des
efforts pour l’exception culturelle. L’ASIC avait justement critiqué le
CNNum qui, par ce biais, tenterait de « légitimer une extension des pouvoirs du CSA sur les contenus diffusés sur internet. » Le pressentiment est ainsi conforté.
Autres avantages : obligation de reprise et de survalorisatrion
Le
rapport Lescure propose aussi que les distributeurs (FAI, terminaux
connectables, plateformes vidéo, magasins d'applications) aient « l'obligation
de faire droit aux demandes de reprise émanant des éditeurs de services
conventionnés, dans des conditions équitables, raisonnables et non
discriminatoires. ». Plus loin, le directeur du théâtre Marigny
veut même que les offres de service public (Arte, France Télévisions,
Radio France, etc.) soient survalorisées chez les nouveaux acteurs
connectés, comme les interfaces des téléviseurs connectables, les sites
de partage de vidéo communautaires, voire… les moteurs de recherche. Un
levier que Lescure envisage même de généraliser quand il affirme que « les
Etats devraient notamment pouvoir garantir aux services remplissant une
mission d'intérêt général (telle la préservation de la diversité
culturelle) une place privilégiée sur ces plateformes. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire