mercredi 11 septembre 2013

Des appareils sans fil sans batterie communiquent entre eux

A lire sur:  http://www.futura-sciences.com/magazines/high-tech/infos/actu/d/technologie-appareils-fil-batterie-communiquent-eux-48594/#xtor=EPR-17-[QUOTIDIENNE]-20130901-[ACTU-Des-appareils-sans-fil-sans-batterie-communiquent-entre-eux]

Capter un peu de l'énergie rayonnée par les multiples émetteurs qui nous environnent, pour la télévision, la radio et la téléphonie mobile, peut suffire à alimenter des petits appareils simples et capables de communiquer entre eux. C'est ce que vient de démontrer une équipe de l’université de Washington qui a créé un réseau fonctionnant sans autre source d'électricité. De quoi intégrer des capteurs dans toutes sortes d'objets, des vêtements aux bâtiments. L’un des chercheurs a répondu aux questions de Futura-Sciences.

Ce schéma illustre le principe de fonctionnement de la rétrodiffusion ambiante (ambiant backscatter). Le relais TV (TV Tower) émet des signaux radio qui sont captés par les étiquettes électroniques. Sur cet exemple, l’étiquette « Alice » est le transmetteur (sender). Elle récupère le signal RF grâce auquel elle s’alimente et peut envoyer des informations à l’étiquette Bob (receiver). Le tout fonctionne sans perturber le signal envoyé aux téléviseurs (Legacy receiver). © University of Washington

Le concept d’Internet des objets va peut-être bénéficier d’une innovation des plus prometteuses. Doter les objets du quotidien, les bâtiments et autres infrastructures de capacités de communication afin qu’ils puissent s’identifier et participer à un réseau d’information est aussi ambitieux que techniquement ardu. Chaque « objet » doit posséder son système de transmission et d’alimentation afin de pouvoir s’identifier de façon autonome sur un réseau d’information dont les utilisateurs sont les bénéficiaires pour de multiples usages. Des contraintes importantes qui ne peuvent pas toujours être adaptées à tous les cas de figure et limitent un déploiement à grande échelle.
Mais un groupe d’ingénieurs du Sensor Systems Laboratory de l'université de Washington a peut-être trouvé la solution à ce casse-tête. Ils ont mis au point un système de communication sans fil où les appareils peuvent échanger des données sans avoir besoin d’alimentation externe ni de batterie. Le concept baptisé « ambient backscatter », ou rétrodiffusion ambiante, se sert des radiofréquences environnantes comme celles des relais TV ou cellulaires comme source d’alimentation et de communication. Cela peut permettre à des capteurs ou des étiquettes électroniques (« tags » en anglais) de fonctionner de façon totalement autonome et sans requérir de maintenance.
Inséré dans les objets du quotidien, ce captage d'énergie ne saurait constituer une puissante alimentation mais suffirait à ces appareils pour signaler leur position (exemple pour retrouver ses clés), envoyer des informations sur leur état ou communiquer entre eux à travers un réseau domestique auquel l’utilisateur aurait accès depuis son terminal mobile. On peut aussi l’envisager pour la surveillance d’édifices sensibles (ponts, réseaux routiers, bâtiments…) en intégrant des capteurs autonomes directement dans la structure. Sur le même principe, de tels capteurs placés dans le béton, la toiture ou les planchers pourraient servir des fonctions domotiques dans une habitation en mesurant par exemple le taux d’humidité et la température.
Les prototypes conçus par les chercheurs de l’université de Washington. De la taille d’une carte de crédit, ils intègrent un microcontrôleur, une Led, l’antenne de réception pour le signal TV et un émetteur UHF large bande. Chaque appareil puisse son électricté dans le signal radio venu des émetteurs de télévision et peut échanger des informations (à très faible débit) avec ses homologues jusqu’à 10 kilomètres de distance.
Les prototypes conçus par les chercheurs de l’université de Washington. De la taille d’une carte de crédit, ils intègrent un microcontrôleur, une Led, l’antenne de réception pour le signal TV et un émetteur UHF large bande. Chaque appareil puisse son électricté dans le signal radio venu des émetteurs de télévision et peut échanger des informations (à très faible débit) avec ses homologues jusqu’à 10 kilomètres de distance.
Les prototypes conçus par les chercheurs de l’université de Washington. De la taille d’une carte de crédit, ils intègrent un microcontrôleur, une Led, l’antenne de réception pour le signal TV et un émetteur UHF large bande. Chaque appareil puisse son électricté dans le signal radio venu des émetteurs de télévision et peut échanger des informations (à très faible débit) avec ses homologues jusqu’à 10 kilomètres de distance. © University of Washington

Prometteur pour les vêtements intelligents

Et l’on songe bien entendu aux vêtements intelligents qui bénéficieraient grandement d’une technologie sans batterie donc moins encombrante et plus durable. « Nous pensons que la rétrodiffusion ambiante serait idéale pour créer un réseau de communication proche du corps car elle nécessite nettement moins d’énergie que les technologies radio conventionnelles (telles que le Bluetooth ou le Wifi) et qu’elle pourrait sensiblement améliorer l’autonomie des batteries des vêtements intelligents, voire les supprimer », a expliqué à Futura-Sciences Aaron Parks, l’un des membres de l’équipe du Sensor Systems Lab. Le procédé pourrait également être utilisé comme système de secours sur un smartphone. Si la batterie vient à lâcher, un capteur autonome pourrait utiliser le signal cellulaire ou TV le plus proche pour permettre d’envoyer au moins des SMS.
Pour démontrer la viabilité du concept, les chercheurs ont créé un système complet, en l'occurrence un réseau d'appareils communicants. De la taille d'une carte de crédit, les unités de ce réseau intègrent un capteur pour le signal TV et un émetteur UHF large bande travaillant à 50 MHz. L’énergie issue des signaux radiofréquence sert à alimenter la carte microcontrôleur, une Led et les capteurs embarqués, des capteurs tactiles capacitifs. Le système repose sur le principe du Morse, envoyant un bit 0 lorsqu’il absorbe le signal radio et un bit 1 lorsqu’il le réfléchit. Comme aucun contrôleur ne centralise ni coordonne les informations qui s’échangent entre les différents capteurs, il a fallu créer un protocole réseau d’accès distribué pour administrer ces flux.

Jusqu’à 10 kilomètres de portée

Les tests ont été réalisés sur des distances par rapport à la source de radiofréquence allant de 800 mètres à 10 kilomètres. À l’intérieur d’un bâtiment, l’échange entre des capteurs peut se faire jusqu’à 45,7 centimètres de distance et 76,2 centimètres en extérieur. Le taux de transfert des données est actuellement de 1 kbit/s, mais il pourrait être supérieur. « Nous avons testé notre prototype à une vitesse de 1 kbit/s, mais nous avons également fait des expérimentations qui montrent que l’on pourrait atteindre les 100 kbits/s sur une rétrodiffusion ambiante de courte portée. Cependant, 1 kbit/s est déjà tout à fait suffisant pour de nombreuses applications », précise Aaron Parks.
Il n’y a pas de limite au nombre de terminaux qui peuvent travailler en même temps via ce protocole de communication. « L’information peut même être relayée par une chaîne de capteurs de façon à étendre le rayon de communication. Nous avons conçu une technique appelée Carrier Sense Multiple Access (CSMA) grâce à laquelle chaque capteur "écoute avant de parler" afin d’éviter d’interférer avec des communications en cours entre d’autres capteurs proches », précise le chercheur de l’université de Washington.
Le système a été éprouvé avec deux scénarios. Le premier consiste à transférer de l’argent d’une carte à l’autre. Lorsque l’utilisateur fait glisser son doigt sur le capteur tactile alors qu’une autre carte est à proximité, le montant stocké sur sa carte est automatiquement transféré et une Led clignote pour confirmer la transaction. Le second scénario est une application destinée au commerce qui permet à des produits dotés d’un capteur d’envoyer une alerte lorsqu’ils sont installés sur un mauvais rayonnage.

Des défis techniques à relever

Bien que la technique soit opérationnelle, il demeure quelques obstacles techniques qui limitent encore un usage en conditions réelles. Tout d’abord, se pose le problème de la disponibilité d’un signal radio ambiant. « Parce que nos capteurs se servent du signal radio à la fois pour communiquer et s’alimenter, le système ne fonctionnera pas si le signal n’est pas assez puissant. », reconnaît Aaron Parks. Si un capteur peut fonctionner jusqu’à 10 kilomètres d’un relais TV, le plus gros défi concerne les communications à l’intérieur des bâtiments. Les obstacles physiques y sont aussi nombreux que variés et ils jouent directement sur la qualité du signal. Pour trouver une solution, les chercheurs planchent sur une réduction de l’énergie nécessaire à l’alimentation des capteurs.
Il y a aussi la question des interférences que peuvent provoquer ces appareils. L’équipe du Sensor Lab a constaté que tel est le cas si des capteurs ou des étiquettes électroniques sont placés à quelques centimètres d’un relais TV. Interrogé par Futura-Sciences au sujet d’un projet de mise sur le marché de cette technologie, Aaron Parks a répondu que plusieurs interlocuteurs avaient manifesté leur intérêt, sans donner plus de précisions. Une commercialisation n’est pas encore à l’ordre du jour nous a-t-il précisé.

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