mercredi 21 mai 2014

La neutralité du Net aux Etats-Unis, une affaire de lobbies

A lire sur: http://www.zdnet.fr/actualites/la-neutralite-du-net-aux-etats-unis-une-affaire-de-lobbies-39801261.htm

Législation : Où l'on voit que contre les opérateurs, AOL, Google et consorts peinent à mettre assez de moyens pour défendre la neutralité du net.
Une étude de la Fondation Sunlight, organisation à but non lucratif dont l'objectif avoué est de contribuer à rendre les gouvernements plus transparents avec les technologies du numérique, vient apporter une lumière crue sur la récente décision de la Federal Communications Commission (FCC) américaine, au sujet de la neutralité du net.
Pour rappel, la FCC a entériné par un récent vote - non définitif pour l'instant - l'existence de "voies rapides". Ce qui ouvre la voie à un "Internet à deux vitesses", spectre honni des défenseurs de la neutralité du net. Si le gendarme américain des télécoms prend ses décisions, la politique américaine, comme celle européenne, se fait rarement ailleurs qu'à l'ombre des groupes de pression de tous genres.
10 groupes pro-neutralité, 10 groupes anti 
Ceux-ci peuvent peser dans les deux sens, évidemment, mais il semble que dans le cas de la neutralité du net la balance est penchée très largement du côté des "anti". Et ladite balance contient, pour modifier son équilibre, des rapports. Mais surtout beaucoup d'argent.
Dans une étude publiée sur The Daily Dot et reprise sur son blog, la Sunlight Foundation a étudié les 20 groupes de pression mentionnant le plus la neutralité du net ou la neutralité des réseaux dans leurs rapports entre 2005 et 2013. Une étude qui ne permet donc pas de tirer d'évidence sur le vote de la FCC, mais met en lumière les rapports de force depuis neuf ans.
Il en ressort une fracture nette : 10 groupes pro-neutralité et 10 groupes anti. "Mais en ce qui concerne l'intensité [de leurs campagnes, NDLR], le lobbying a été loin de l'équilibre. Les principaux groupes pro-neutralité ont publié 176 rapports mentionnant la neutralité du net. Mais les organisations anti-neutralité les ont largement dépassés, déposant 472 rapports mentionnant la neutralité du net. C'est un ratio de 1 à 2,7."
Les anti ont les rapports et l'argent 
Un déséquilibre très clair dans la figure ci-dessous, faisant apparaître, par groupe de pression, le nombre de rapports. En rouge, les organisations s'opposant à la neutralité du net. En vert, celles la soutenant :
Les plus productifs sont donc clairement les "anti". Parmi lesquels on retrouve les grands opérateurs américains : Verizon - qui a créé la panique en attaquant en 2010 la position pro-neutralité de la FCC devant les tribunaux, et en remportant son appel, AT&T, Comcast et la NTCA (association des opérateurs câble). Juste derrière, le lobby des éditeurs de musique et - premier groupe pro-neutralité du net - AOL.
AOL, Level 3 (opérateur et CDN), Google, Microsoft et Apollo Investment Management sont ainsi les principaux défenseurs de la neutralité du net. Mais à eux cinq, ils n'ont pas publié autant de rapports que le premier "anti" de la liste. Un déséquilibre flagrant, que l'on retrouve également dans les montants alloués à cette question, et agrégés en "pro" contre "anti" dans le graphique ci-dessous :
De ce point de vue, note la fondation Sunlight, il y a un mieux. Alors que les dépenses des anti-neutralité étaient régulièrement égales à cinq fois celles des pro, l'arrivée de Google sur la question a permis de réduire l'écart à trois contre un. Ce qui laisse tout de même - en ordre de grandeur - plus de 25 millions de dollars en faveur de la neutralité contre plus de 75 millions contre.
Jeu faussé ? 
Un jeu apparemment faussé, d'autant que l'arrivée de Google dans la partie n'a pas découragé les détracteurs de la neutralité du net. Ceux-ci ont-ils perçu Google comme une menace sérieuse, ou se sont-ils sentis portés par l'échec de la FCC face à Verizon ? Toujours est-il qu'ils n'ont, sauf en 2012, pas cessé d'augmenter leurs dépenses de lobbying.
Google a ainsi dépensé 18,22 millions de dollars pour défendre la neutralité du net en 2012. Mais malgré la somme exorbitante, il n'est que deuxième, derrière la NCTA et ses 18,89 millions de dollars, et demeure bien seul dans le quinté de tête, face à quatre opposants à la neutralité (outre la NTCA, on retrouve AT&T, Verizon et Comcast).
On ne peut désormais qu'attendre les conséquences du vote de la FCC. Alors que commentaires et modifications vont affluer sur le site du gendarme américain des télécoms dans les prochaines semaines, les opérateurs et leurs alliés dans la croisade anti-neutralité vont-ils accentuer leurs efforts pour enterrer définitivement la neutralité du net, ou ses défenseurs vont-ils se réveiller ?
Impossible à dire pour l'heure, mais l'étude de la fondation Sunlight a un intérêt évident : au-delà des discours de principe et des oppositions sur un choix clair pour l'Internet américain - et donc au-delà - et son futur, elle montre que la question de l'argent et du lobbying n'est surtout pas à écarter de l'équation.

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